Propos sur l'Office des Ténèbres

De Lamentations de Jérémie.

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* <big>'''[[L'extinction des cierges]]'''</big>
* <big>'''[[L'extinction des cierges]]'''</big>
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Au XIIe siècle, Rome adopte les coutumes gauloises d'extinction des lumières au cours des trois jours saints, mais c'est une coutume qui remonte dès le VIIIe siècle. Pendant l'office, on éteint un à un les cierges  de cera communi  de l'hericia      placé habituellement du côté droit de l'autel, après la lecture de chaque psaume (9 pour les Matines, 5 pour les Laudes), tantôt d'un côté tantôt de l'autre, commençant par le côté du Chœur : Pour cet Office aujourd'hui & les 2 jours suivans, on n'allume que 15 cierges. Dans les Eglises qui n'ont pas de luminaire aux côtés de l'Autel, l'on place contre les marches de l'Autel au milieu, un grand Chandelier triangulaire, propre à tenir 15 Cierges. A la fin de chaque Pseaume on éteint un des Cierges, tantôt d'un côté tantôt de l'autre, commençant par le côté du Choeur qui est en semaine , lesquels representent les douze Apostres & les trois Maries, qui perdirent leur foy, & quitterent leur Maistre l'un après l'autre .
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* <big>'''[[Le rituel du bruit à la fin de l'Office]]'''</big>
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A la fin de l'office, un seul éclaire encore la communauté . Il est placé derrière l'autel : il symboliserait le corps de Jésus-Christ après sa crucifixion. Après un temps de silence, ce cierge est rapporté pour signifier la victoire de la lumière sur les ténèbres, la résurrection de Jésus-Christ vainqueur des forces du mal.
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Ce rite est très discuté : le nombre de cierges pour commencer ainsi que leur signification liturgique.
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Pour certains, l'extinction progressive des cierges signifierait l'abandon des disciples. Le dernier était caché derrière l'autel pour être ensuite montré à la fin de l'office afin de symboliser la passion, la mort et la résurrection du Christ. Pour d'autres, les cierges placés sur l'autel représenteraient les Prophètes qui avaient annoncé la venue du Messie et qui furent mis à mort par les Juifs : Et on esteint un cierge à la fin de chaque Pseaume, pour marquer que la lumiere de la Foi dont les Prophetes ont éclairé les Juifs, estoit éteinte en eux, lorsqu'ils outragerent, & firent mourir le Sauveur du monde. Et à la fin du Cantique de Zacharie, pere de Saint Jean Baptiste, on n'éteint point le cierge qui represente Jesus-Christ, (que Saint Jean a montré estre la veritable lumiere du monde ;) pour nous faire entendre que Jesus-Christ mourant selon son Humanité, estoit toûjours vivant selon sa Divinité de Jesus-Christ. On cache ce cierge, pour marquer que la Divinité de Jesus-Christ estoit cachée sous le voile de son Humanité. C'est aussi pour representer Jesus-Christ dans le Sepulchre. On montre ensuite ce cierge, pour representer sa Resurrection.
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Dom Claude de Vert réalise au début du XVIIIe siècle des recherches très approfondies auprès de nombreux diocèses en France sur l'origine et la signification de l'extinction des cierges. Et c'est dans un long discours qu'il démontre le résultat auquel il souhaite obtenir. Les notes sont de l'auteur.
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Alors on éteignoit toutes les lumieres & jusqu'aux lampes , comme inutiles. In luce extinguantur, dit l'ordinaire de l'église de Soissons. Dans la suite, ces matines du jeudy, du vendredy & du samedy-saint, avancées de quelques heures, & même en plusieurs églises, anticipées dez la veille  (parce que les nuits depuis l'équinoxe commencent en effet à devenir beaucoup plus courtes  ; & toujours accompagnées de leur luminaire accoutumé, finissoient au contraire dans la profonde nuit : ce qui par consequent rendoit alors, principalement sur la fin de laudes, la lumiere absolument nécessaire. Cependant, comme on ne s'avise gueres d'innover sur ces sortes de pratiques, on continua d'éteindre généralement tous les cierges, comme on faisoit au temps même que matines commencées à minuit, finissoient vers le point du jour. Seulement on en garda un, soit pour aider à lire la collecte , ou pour éclairer à sortir de l'église, & aux moines & autres réguliers, à remonter au dortoir, ou enfin pour quelqu'autre besoin que ce pust-être. Il paroît sur tout qu'on affecta de les éteindre pendant le Benedictus, & de réciter ce cantique au milieu des tenebres ; jusque-là que le cierge qu'on réservoit pour la fin, fut même entierement caché depuis l'extinction du reste du luminaire : ensorte que, cette lumiere venant à paroître & à éclairer au milieu des tenebres & dans les ombres de la nuit, exprimoit merveilleusement, au goût de ces temps-là, ces derniers mots du Benedictus qui terminoit tout l'office, ILLUMINARE his qui in tenebris & in umbra mortis sedent. Il est dit, par exemple, dans le cérémonial des dames de Sainte-Glossine de Mets, "qu'Après les pseaumes de laudes, ces trois jours-là, on éteint tout le luminaire & qu'il sera fait tenebres." A laudes, dit l'ordinaire d'Amiens de 1414, on éteint peu à peu les lumieres, ensorte qu'à la derniere antienne il soit tenebres." On chante ensuite le Laudate, dit le breviaire de Dol, & on éteint le luminaire, & à la fin de l'antienne de devant le Benedictus, on cache le cierge qui étoit allumé ; ensorte que ce cantique & les prieres dont il est suivi, soient chantées dans les tenebres ; IN TENEBRIS dicantur." L'ordinaire des Jacobins & celuy des chanoines-réguliers du prieuré de Saint-Lo de Rouën, portent à peu près la même précaution. "Qu'on éteigne le cierge qui restoit seul, disent ces ordinaires, & qu'on récite en tenebres le Benedictus & tout ce qui suit. Quæ sequuntur, in tenebris cantantur, dit le rituel MS. de l'abbaye de N.D. de Daoulas." Que le Benedictus avec son antienne soit chanté pareillement en tenebres, dit l'ordinaire de Rheims & aussi celuy de Saint-Martin de Tours. Et de là vient que tout ce qui se faisoit & se récitoit depuis le Benedictus, jusqu'à la fin de l'office, étoit nommé tenebres. UBI verò ventum est ad TENEBRAS, dit un auteur du onzieme siecle, dum Kyrie eleïson cum versibus cantaretur &c. Et c'est même ce qui dans la suite donna le nom de tenebres à l'office entier, je veux dire, à matines & à laudes, jointes ensemble. Matutinæ tenebrosæ dicuntur, dit le rituel de Daoulas, cité plus haut, eò quod sine lumine terminantur. Voyez ce que nous avons déja observé sur cela vol. I. page 45. à quoy on peut ajouter que cet office se trouve déja ainsi appellé dans la chronique de Hugues de Flavigny, qui vivoit au commencement du XII. siecle. Enfin dans tous les anciens ordinaires ou cérémoniaux, on remarque une attention nompareille à éteindre, du moins à cacher toutes les lumieres pendant le Benedictus, & à n'en laisser paroître aucune qu'à la fin. "Lors qu'on commence l'antienne de Benedictus, dit l'ordinaire de Saint Pierre-le-vif de Sens, qu'on cache la lumiere qui est restée sous l'autel de Saint-Potentien, in crotis sancti Potentiani. Et c'est ce qui s'observe encore communément par tout, suivant le cérémonial Romain, qui porte qu'On tiendra caché sous l'autel ou en un autre endroit, où il ne puisse être apperçu, l'unique cierge qui reste allumé à la fin du Benedictus, jusqu'à ce que le supérieur venant à donner le signe, on remette cette lumiere en vuë. On voit aussi que chez les Chartreux, dez que le dernier Laudate de laudes est commencé, le sacristain cache avec soin sa lanterne, & qu'à l'antienne de Benedictus, il éteint même la lampe ; tant il est capital de dire, ces jours-là, ce cantique, dans les tenebres & dans l'obscurité. A Rouën pour n'y être pas surpris, ils faisoient même ensorte que l'office fût entierement achevé avant le jour. Custos ecclesiæ (le sacristain ou coutre) sollicitè provideat, dit l'ancien ordinaire de cette église, quòd ante lucem suo modo spatiose nocturnum officium compleri valeat. Je vois dans l'ancien ordinaire de Noyon, qu'on se plaint de ce qu'on attendoit que le Benedictus fût achevé pour tout éteindre. Il faut, dit cet ordinaire, que cela soit fait avant le commencement du cantique .
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Plus loin , il rajoute encore une précision : Au samedy-saint, au rit Romain, le diacre, en élevant le cierge triangulaire allumé, dit LUMEN Christi . Et à l'abbaye de Fecan, parce que le baston qui portoit ce cierge, étoit tourné en forme de serpent, ou plutôt à cause que la bougie serpentoit autour du baston, on chantoit en rentrant dans le chœur, Sicut exaltatus est serpens in eremo, ita exaltari oportet Filium hominis.
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De tels propos sont repris à nouveau sous forme d'un entretien, technique de communication fort utilisée à cette époque, entre Dom Claude & de Dom Pierre moines de l'Ordre de Clugny, sur la disposition de l'Office de la Semaine-sainte contenu dans le nouveau Breviaire de cette Ordre, dialogue apportant quelques précisions complémentaires  notamment sur le nombre de cierges utilisés. On se référera à l'intégralité du texte en Annexe A.
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Jean Grancolas, de son côté, pense qu'on a un peu rendu énigmatique quelque chose qui a dû, à l'origine, être banal et sans dessein . Dans la suite on a trouvé du mystére à finir quand tout étoit éteint, & on a appelé Ténébres ou Matutinæ Tenebræ, & quod sine lumine terminantur, parce que quand on les finit il n'y a plus de lumiére. Nous avons vû qu'Abelard les appelle Ténébres  : Horum vulgo dierum vigiliæ nuncupantur Tenebræ... Hugues de Flavigni, qui vivoit au douziéme siecle, leur donne aussi ce nom. Aujourd'hui on a si fort avancé Matines & Laudes, qu'ils finissent à la nuit, & on éteint les cierges dans le tems qu'on en auroit le plus de besoin, si on avoit à rester à l'Eglise. Dans Amalaire  on voit que Theodore, Archidiacre de Rome, étant consulté sur ces cierges qu'on éteignoit déjà peu à peu au tems d'Amalaire, répondit, qu'il n'avoit point vû éteindre les cierges la nuit à l'Office en l'Eglise de S. Jean de Latran, où le Pape assistoit : Solco esse cum Apostolico in Lateranis quando celebratur Officium de Cœna Domini, nihil in cadem nocte observatur de extinctione luminum.
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Il poursuit ensuite ses réflexions sur le nombre de cierges, nombre qui soucie beaucoup de monde si l'on en croit les textes qui y font référence. On met quinze cierges sur le chandelier, à cause des quinze Pseaumes de l'Office, & on en éteint un à la fin de chaque Pseaume, Tot cerei ad nocturnos, & extinguuntur per singulas Lectiones, dit Ulric, dans ses Coutumes de Cluni. Dans l'Ordre Romain on ne marque point le nombre des cierges qu'il y avoit : dans le Code de Ratolde de Corbie, où l'on marque l'usage de Rome qu'on y doit suivre, il est marqué que l'Eglise sera toute éclairée, & qu'on y mettre trente-huit cierges : Ecclesia omni lumine sit decorata, idest, triginta octo luminaribus. Dans les Statuts de Lanfranc, il est ordonné d'en mettre vingt-cinq, pour en éteindre un à chaque Antienne, & à chaque Répons ; en d'autres endroits on éteignoit tous les cierges pendant les Matines, & il ne restoit à Laudes que les lampes devant l'Autel.
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De son côté, l'Abbé François Cancellieri indique que par cette cérémonie l'on represente, le refroidissement des Apôtres et des Disciples, qui chancellerent dans la foi, oublierent leurs promesses, et abbandonerent leur bon maître par une fuite lache et honteuse. Le cierge qui reste seul allumé, et que l'on cache deriere l'autel, nous figure la sainte Vierge qui resta ferme et inébranlable dans la foi de la resurection de J.C. bien refroidie et obscurcie parmi les Disciples, ou bien J.C. lui-même, que les hommes ingrats et pervers croyaient mort, lorsqu'il ressuscita glorieux, après avoir resté trois jours dans le sepulchre.
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Pour l'Abbé Houssaye, il n'est pas jusqu'aux cérémonies, à la fois sobres et mystérieuses, dont il est accompagné, qui ne révèlent son origine. On en a donné des explications symboliques dont je suis si éloigné de contester la valeur que je les rapporterai ailleurs. Comment cependant ne pas se rappeler, à la vue de ces lumières en plus grand nombre, celles que les premiers chrétiens devaient allumer pour dissiper l'obscurité des catacombes, et dans l'extinction successive des quinze cierges du chandelier triangulaire et des cierges de l'autel, un souvenir de ces offices qui se prolongeaient jusqu'au jour, et vers la fin desquels on éteignait peu à peu les lampes, à mesure que le jour pénétrait dans l'église construite par la foi audacieuse des chrétiens, ou dans la salle haute, leur abri durant la persécution .
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Le témoignage du chanoine Goschler apporte encore un éclairage supplémentaire à ceux relevés ci-dessus. Pour lui, l'extinction successive des cierges rappelle : 1.° Que tous les prophètes qui rendirent successivement témoignage au Sauveur, loin d'être écoutés par les Juifs, furent au contraire persécutés, mis à mort, et que par suite les Juifs ne reconnurent pas le Christ, qui resta caché à leur âme endurcie, 2.° Que les apôtres abandonnèrent le Sauveur pendant sa passion, le renièrent même et qu'ainsi non seulement le Christ s'évanouit à leurs yeux par la mort, mais encore à leur esprit par leur manque de foi ; qu'à la mort du Rédempteur, de profondes ténèbres se répandirent sur la terre, mais que les ténèbres de ceux qui ne crurent pas en lui furent bien plus épaisses encore. Le Christ est notre lumière, il se cache à nos yeux et nous laisse marcher dans les ténèbres et le mal, lorsque nous lui fermons volontairement l'accès de notre cœur. – Enfin le cierge caché derrière l'autel signifie encore que le Christ, qui est mort, n'a pas cessé néanmoins, pendant ces saintes journées, de vivre mystérieusement pour les siens et de les assister de sa grâce.
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Ces interprétations d'une disposition, dont l'origine est difficile à cerner puisque aussi bien, anciennement, on ne mettait pas de cierges sur l'autel, serait une survivance d'un rite de l'Eglise primitive en un temps où l'office étant célébré à l'aube, la lumière naturelle du jour rendant progressivement inutile la clarté artificielle des cierges. Ce rite ancestral ne posait pas trop de problème dans la mesure où le jour se levant, les cierges étaient éteints un par un.
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Les 15 cierges symboliseraient les 11 apôtres fidèles, les 3 Marie et le Christ. L'Abbé Houssaye reprend les mêmes propos que l'Abbé Meusy apporte dans son Cathéchisme des Fêtes de Besançon écrit en 1774.
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Il y a d'autres significations sur la signification du nombre de cierges : 11 apôtres, 2 disciples et le Christ (le compte n'y est pas !).
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A remarquer que le nombre de cierges était variable d'une paroisse à l'autre au Moyen Âge : 7 ou 72 du côté de Metz , 9 à Nevers, 13 à Paris et Reims, 24 à Salisbury, 25 à York et Hereford , 26 à Amiens, 44 à Coutances, etc., et chaque nombre devait avoir sa signification locale. A la cathédrale de Séville en Espagne, le candélabre triangulaire contient 16 cierges illustrés chacun d'une image de saint.
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A la chapelle Sixtine à Rome, les cierges sont de cire jaune. Six ont été posés sur l'autel, six sur la cancellata et quinze sur un candelabre triangulaire, placé du côté de l'épître.
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Dans le dialogue entre deux moines, Dom Claude de Vert expose longuement le sens et le nombre de ces lumières mis en scène. Résumons un peu les débats qui se perdent dans des méandres et qu'il n'est pas utile de rappeler ici. Pour moy, dit un des moines, je ne sçache point de raison mysterieuse de ce nombre. Il y en peut neanmoins avoir ; en effet quelques Rituels  appellent ces cierges candelæ mysteriales. Mais il en faut donc trouver aussi pour les nombres de neuf,  de douze,  de treize,  de quinze,  de vingt-quatre,  de vingt-cinq,  de vingt-six,  de quarante-quatre,  &c. en usage en differentes Eglises. En tout cas, s'il en étoit necessaire, nous n'en manquerions pas pour vingt-& un qui est le nombre septenaire repeté trois fois ; ou, si l'on veut, car tout cela est arbitraire, le ternaire repeté sept fois.
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Il ajoute que si l'Ordre Romain précise qu'il faut des cierges pour les cérémonies du Jeudy, du Vendredy & du Samedy-saint (Ecclesia sit omni lumine decorata) & qu'on éteignoit ces cierges peu à peu, paulatim, [et d'une façon égalitaire] paulatim & æqualiter,  il convient d'en éteindre une partie à chaque Nocturne, par exemple, environ le quart,  & même le tiers  dans les Eglises, comme celle de Rome, où on les éteignoit tous avant Laudes, & où il ne restoit pour cet Office que des lampes, l'on éteignoit aussi successivement. Dans la suite pour faire la chose avec encore plus d'ordre, & y proceder même avec ceremonie… on détermina de les éteindre un à un ; & cela en quelques Eglises à chaque Pseaume ;  en d'autres, à chaque Antienne  ; en d'autres, à chaque Leçon  ; en d'autres, à chaque Pseaume & à chaque Leçon  ; en d'autres, à chaque Pseaume & à chaque Leçon  ; en d'autres, à chaque Pseaume & à chaque Répons  ; & enfin à d'autres, à chaque Pseaume, à chaque Leçon, à chaque Antienne & à chaque Répons ...  Ceci explique pourquoi le nombre de cierges est tant variable d'un diocèse à l'autre, voire d'une église à l'autre.
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Le rite de l'extinction proprement dite reste à Claude de Vert une inconnue qu'il tente d'expliquer en posant la question de savoir pourquoi on pouvoit y diminuer le nombre des lumieres, & mesme les éteindre toutes, … particulierement sur la fin, c'est-à-dire, vers le Benedictus. Je vous passeray encore, si vous voulez, le troisiéme Nocturne, qu'on ne peut douter qui n'attrapât quelquefois le jour. Mais que dans la profonde nuit, c'est-à-dire, au premier & au second Nocturne, on éteignît des cierges, par la raison que le jour venoit, comme il paroit que vous voulez l'insinuer, je vous avouë que c'est ce que j'ay de la peine à me persuader.
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La verité est que tout cela n'est point sans difficulté. Mais pour en sortir, il faut supposer que cette extinction des lumieres n'a d'abord été pratiquée qu'à Laudes ; & que ce n'a été que dans la suite, & particulierement depuis que Laudes furent jointes à Matines, que cette extinction venant à se tourner en pure cérémonie, elle fut portée jusques sur tout cet Office, & commença dès le premier Nocturne, quoique recité dans la profonde nuit.
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Les Chartreux  aussi bien que tout l'Ordre de Citeaux  n'en éteignent point encore à Matines ces jours-là ; mais seulement à Laudes, & cela, vers le dernier Pseaume ou le Benedictus. Il en étoit de même dans la Congregation de Bursfeld … Les Carmes avoient toûjours observé jusqu'au commencement de ce siecle, ou tout au plus jusqu'à la fin du dernier, de n'éteindre des cierges, ces trois jours-là, qu'à Laudes, sçavoir à la fin de chaque Antienne  nous avons avec cela l'Eglise de S. Martin de Tours, où tous les jours de l'année on ne diminuë encore le luminaire qu'au dernier Pseaume de Laudes. Et on voit que dans l'Eglise de Paris, ces trois jours-là tout le fort de l'extinction se fait à Laudes, où durant le Cantique un éteint tous les cierges de la grosse lampe ; au Laudate, ceux des petites ; & au Benedictus, ceux l'Autel. Tout cela prouve, comme vous voyez, que cette ceremonie ne regardoit d'abord que Laudes.
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Selon M. Marolles, les six cierges [de dessus l'autel] qu'on éteint ainsi successivement, representent les Prophetes qui en divers temps annonçans la venuë du Fils de Dieu, ont esté cruellement mis à mort : & celuy qui estoit au haut du chandelier triangulaire, éteint le dernier, nous donne à connoistre que Nostre Seigneur ayant accomply toutes les propheties, est mort pour établir la Foy. Les lampes & autres lumieres de l'Eglise, sont pareillement éteintes : ce qui marque le miserable état où se trouva le monde, Jesus-Christ sa vraye lumiere estant éteint par la Synagogue.
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L'Oraison achevée, on fait quelque bruit, & incontinent paroist le Cierge allumé, qui étoit caché sous l'Autel. Alors tout le monde se leve, & chacun s'en va en silence.
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Le Cierge qu'on fait paroistre allumé, qui auparavant sembloit estre éteint, nous enseigne que Nôtre Seigneur estant mort quant à l'humanité, demeura vivant quant à la divinité, qui pour lors ne paroissoit pas ; mais fut manifestée au temps de sa Resurrection. Que si on fait quelque bruit avant que de s'en aller, c'est pour montrer avec combien de tumulte & d'insolence, les Soldats envoyez se saisirent de Nôtre Seigneur au jardin des Olives.
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Selon le bréviaire de la Société des Libraires, l'extinction des Cierges nous represente les ténébres qui couvrirent la Terre, lorsque le Fils de Dieu rendit l'esprit, & ces ténébres, dit Saint Leon, reprochoient aux Juifs l'aveuglement de leur cœur, qui les portoit à faire mourir celui qu'ils devoient reconnoïtre pour leur Sauveur, après tant de miracles dont ils avoient été les témoins. Le Cierge allumé que l'on cache sous l'Autel, veut nous figurer Jesus-Christ même, qui étant mort & enseveli, vivoit encore d'une vie cachée aux hommes, parce que la mort naturelle & veritable qui avoit separé son Ame de son Corps, n'avoit pü separer la Divinité du Corps ni de l'Ame : ainsi ce Corps tout privé qu'il étoit de la vie naturelle, vivoit en quelque maniere d'une vie divine, & reprit peu de tems après la vie qu'il avoit perduë, ce qui peut être marqué par ce même Cierge que l'on tire allumé de dessous l'Autel.
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Pour Ludovic Celler, les ténèbres ont leur origine dans les adorations secrètes et poursuivies des premiers chrétiens ; les cierges qui figurent dans ces cérémonies ont plusieurs significations ; ils rappellent les lumières allumées dans les catacombes par les fidèles persécutés, et personnifient par leur nombre Jésus-Christ d'abord, puis les apôtres et trois Maries. Le cierge qui personnifie le Christ est en cire blanche ; on le place en haut du candélabre triangulaire qui porte les lumières ; les quatorze autres cierges sont en cire jaune ; on les éteint successivement pendant l'exécution des ténèbres, et cette extinction successive peut rappeler la fuite des apôtres et l'abandon de plus en plus grand de Jésus-Christ pendant sa passion.  Il précise dans un autre ouvrage que l'ordre triangulaire du chandelier est un souvenir de l'ancien chandelier à vingt-quatre branches qui brûlait dans les églises primitives, et que l'on éteignait cierge après cierge, à mesure que les vingt-quatre heures du jour s'écoulaient.
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Paul Renouard (1891) rapporte de son voyage à Rome que les liturgistes [lesquels ?] donnaient de cette cérémonie une explication spécieuse : Lorsque le maître des cérémonies pose le cierge sur l'autel, c'est Jésus sur le calvaire. Lorsqu'il le cache derrière l'autel, c'est la sépulture.
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Le R. P. Dom Prosper Guéranger explique dans son ouvrage concernant L'Année liturgique, la Passion et la Semaine Sainte , que le Fils de Dieu est éclipsée sous les ignominies de sa Passion. Il était "la lumière du monde", puissant en œuvres et en paroles, accueilli naguère par les acclamations de tout un peuple ; maintenant le voilà déchu de toutes ses grandeurs…Chacun s'éloigne de lui : Pierre même nie l'avoir connu. Cet abandon, cette défection presque générale sont figurés par l'extinction successive des cierges sur le chandelier triangulaire, même jusque sur l'autel. Cependant la lumière méconnue de notre Christ n'est pas éteinte, quoiqu'elle ne lance plus ses feux, et que les ombres se soient épaissies autour d'elle. On pose un moment le cierge mystérieux sur l'autel. Il est là comme le Rédempteur sur le Calvaire, où il souffre et meurt. Pour exprimer la sépulture de Jésus, on cache le cierge derrière l'autel ; sa lumière ne paraît plus. Alors un bruit confus se fait entendre dans le sanctuaire, que l'absence de ce dernier flambeau a plongé dans l'obscurité. Ce bruit, joint aux ténèbres, exprime les convulsions de la nature, au moment où le Sauveur ayant expiré sur la croix, la terre trembla, les rochers se fendirent, les sépulcres furent ouverts. Mais tout à coup le cierge reparaît sans avoir rien perdu de sa lumière ; le bruit, cesse, et chacun rend hommage au vainqueur de la mort.
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En Corse, les membres de cinq confréries de Bonifacio (Sainte-Croix, Saint Jean-Baptiste, Saint Barthélémy, Sainte Marie-Madeleine et Saint Erasme) sont assis dans les stalles derrière le maître autel et chantent l'Office des Ténèbres : chaque leçon est chantée par un seul confrère à la fois et est suivie des psaumes récités en commun. A la fin de chaque leçon, le confrère interprète se lève, se dirige vers le chandelier et éteint le cierge le plus bas, de la gauche vers la droite.
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A la fin des leçons, le dernier chantre se lève, prend le dernier cierge et entonne le Benedictus. Puis on éteint les six autres chandeliers simples disposés sur l'autel principal.
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Ce dernier cierge faisait dire aux anciens Corses que lorsque le Christ est mort dans les âmes, le monde est plongé dans les ténèbres : Spenti i lumi, mortu u Cristu.
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Le rite de l'extinction des cierges a fait l'objet d'un long et vaste débat sur l'origine de la pratique et son application dans l'Église. On peut peut-être se risquer de se rapprocher des vues de M. Grancolas : a-t-on rendu énigmatique quelque chose d'ordinaire et sans dessein ! En tout cas, c'est ce qu'un des rédacteurs de La Semaine Sainte à Rome  élude tout simplement en indiquant qu'on a voulu donner de cet usage une série d'explications mystiques sans aucune valeur historique. A Rome on ne connaissait pas encore cet usage au IXe siècle, il provient des rites de l'Eglise franque ou gallicane. Dans les basiliques romaines on allumait pour l'office nocturne le nombre de phares ou lampes nécessaire pour éclairer l'assistance et spécialement les lecteurs. On les éteignait peu à peu à mesure que le jour pénétrait dans la basilique.
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== Le rituel du bruit à la fin de l'Office ==
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Á la fin de la cérémonie, après un instant de méditation, le silence était interrompu par un bruit appelé strepitum. Ce bruit serait aussi un vestige de l'antiquité. C'est en frappant de la main sur son banc ou sur son livre que le célébrant donnait le signal du départ . Cependant, certains auteurs prétendent que le bruit fait par toute la communauté représenterait la confusion et le désordre produits sur la terre à la mort de Jésus-Christ. Pour d'autres encore, ce fracas  depuis les stalles du chapitre exprime le bouleversement de la nature à l'instant où, quand le Christ expira sur la croix, la terre trembla, les roches se fendirent et les tombeaux s'ouvrirent. Que si on fait qq bruit avant de s'en aller, c'est pour montrer avec combien de tumulte & d'insolence, les Soldats envoyez se saisirent de Nôtre Seigneur, au jardin des Olives . Selon le même M. Marolles, si on frape le bois de la main, c'est que Nôtre-Seigneur criant sur le bois de la Croix, fit voir évidemment sa charité & sa miséricorde.  Deux ouvrages, deux avis divergents.
Á la fin de la cérémonie, après un instant de méditation, le silence était interrompu par un bruit appelé strepitum. Ce bruit serait aussi un vestige de l'antiquité. C'est en frappant de la main sur son banc ou sur son livre que le célébrant donnait le signal du départ . Cependant, certains auteurs prétendent que le bruit fait par toute la communauté représenterait la confusion et le désordre produits sur la terre à la mort de Jésus-Christ. Pour d'autres encore, ce fracas  depuis les stalles du chapitre exprime le bouleversement de la nature à l'instant où, quand le Christ expira sur la croix, la terre trembla, les roches se fendirent et les tombeaux s'ouvrirent. Que si on fait qq bruit avant de s'en aller, c'est pour montrer avec combien de tumulte & d'insolence, les Soldats envoyez se saisirent de Nôtre Seigneur, au jardin des Olives . Selon le même M. Marolles, si on frape le bois de la main, c'est que Nôtre-Seigneur criant sur le bois de la Croix, fit voir évidemment sa charité & sa miséricorde.  Deux ouvrages, deux avis divergents.

Version du 2 juillet 2010 à 08:42

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